Après Kadhafi, Poutine ?
Les grands événements avancent à pas de colombe, remarquait Nietzsche. Pourquoi sont-ils si silencieux, sinon qu'ils froissent nos préjugés et accusent nos myopies ? Ainsi va-t-il des élections russes ce 4 décembre. La claque magistrale qu'elles infligent au parti présidentiel amorce le déclin d'une démocratie d'apparence ("imitation", disent les dissidents) et la faillite des illusions qu'elle a nourries. La leçon magistrale des manifestations démocratiques de samedi, les plus grandes depuis 1991 et peut-être depuis février 1917, s'impose : Poutine, après Kadhafi, Ben Ali, Moubarak ou Assad, titube.
Pourtant, l'année devait finir en apothéose pour le numéro un de Russie. Son étoile brillait au plus haut. Il avait décroché les Jeux olympiques, la Coupe du monde de foot, des stars hollywoodiennes et françaises dûment rémunérées se pressaient à son anniversaire, le monde des paillettes et des puissants souriait au pétrotsar. L'ouverture automnale du gazoduc de la Baltique en direct vers l'Allemagne couronnait son contrôle quasi absolu des ressources énergétiques de l'Union européenne. Ensemble Merkel, Fillon et Medvedev avaient salué cette mainmise – un axe Moscou-Berlin-Paris (dans cet ordre de préséance), souligne Immanuel Wallerstein, professeur de géopolitique à Yale.Avant le défi des élections du 4 décembre, le projet "eurasiatique" du Kremlin semblait vainqueur à tous les coups. Contre l'Alliance atlantique, toujours désignée ennemi numéro un de la sacro-sainte Russie, contre "l'illusion" des droits de l'homme, le nouveau "bloc Confucius" Pékin-Moscou paraissait stable et sûr de lui. Le Kremlin hérissait ses frontières avec l'Europe de missiles, croquait ses "voisins proches", enterrait la démocratie en Ukraine et occupait 20 % de la Géorgie…
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